
Un an plus tard, les souvenirs du festival d'Avignon 2008 s'agrègent tel un sédiment de sensations et d'images dans le labyrinthe de ma mémoire. Longtemps abandonnés sous les décombres d'une saison théâtrale désormais en friches, ils resurgissent du néant alors que l'édition 2009 a déjà pris son envol. Ce jeu entre ce qui fut et ce qui vient est au coeur de Yo en el futuro, la dernière création du metteur en scène argentin Federico Leon présentée lors du Kunsten Festival des Arts à Bruxelles, en mai dernier, avant sa prochaine venue au festival d'Avignon.
Fascinant jeu de miroirs entre théâtre et cinéma, entre réalité et fiction, entre transmission et réminiscences, Yo en el futuro (que l'on peut traduire par «moi dans le futur»), met en scène sur le plateau et à l'écran (par l'entremise de petits films familiaux), trois enfants, trois adultes et trois personnes âgées dans des situations banales mais rythmées par des allers-retour oniriques entre passé et futur orchestrés dans le présent de la représentation.

Ce dispositif d'une subtilité rare sécrète de vertigineuses collisions temporelles dans lesquelles s'engouffrent avec jubilation le roman familial lacunaire concocté par Federico Leon. Ici, le temps se fragmente et se disloque comme dans un récit à tiroirs de Borges, bouleversant notre regard et notre perception de spectateur comme pour suggérer que nos vies réelles et projetées (par un médium comme le cinéma ou simplement par notre esprit) sont inextricablement liées.
A mesure que le spectacle chemine sur les frontières ténues de l'imaginaire, une indicible mélancolie - bercée par les notes minimalistes d'un piano - s'insinue entre les images et la scène, entre les ombres à l'écran et les corps sur le plateau. Avant qu'un final sidérant ne nous laisse pantois d'admiration par sa façon modeste de dévoiler les artifices et les vertiges de la représentation. Soit un petit bijou d'intelligence, de finesse et de sensibilité - en à peine 45 minutes - où Federico Leon esquisse les contours d'un espace mental infini traversé par de mystérieuses failles intimes par lesquelles il est possible de remonter le temps et d'explorer le labyrinthe de nos souvenirs.
Représentations du 20 au 23 juillet à 18h à la salle Benoît-XII.
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